Les grandes dates de la fibre 2024 ARCEP

Avis n° 2024-0745
de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes
et de la distribution de la presse
en date du 2 avril 2024
portant sur les conditions tarifaires d’accès au réseau à très haut débit en fibre
optique de la Société Publique Locale Nouvelle-Aquitaine Très Haut Débit
L’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la
presse (ci-après « l’Autorité » ou « l’Arcep »),
Vu le code général des collectivités territoriales (ci-après « CGCT »), et notamment son article
L. 1425-1 ;
Vu le code des postes et des communications électroniques (ci-après, « CPCE »), notamment ses
articles L. 32-1 et L. 34-8-3 ;
Vu la décision n° 2009-1106 de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des
postes en date du 22 décembre 2009 précisant, en application des articles L. 34-8 et L. 34-8-3 du CPCE,
les modalités de l’accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique
et les cas dans lesquels le point de mutualisation peut se situer dans les limites de la propriété privée ;
Vu la décision n° 2010-1312 de l’Autorité en date du 14 décembre 2010 précisant, en application des
articles L. 34-8 et L. 34-8-3 du CPCE, les modalités de l’accès aux lignes de communications
électroniques à très haut débit en fibre optique sur l’ensemble du territoire à l’exception des zones
très denses ;
Vu les lignes directrices relatives à la tarification de l’accès aux réseaux à très haut débit en fibre
optique déployés par l’initiative publique, publiées le 7 décembre 2015 (ci-après « les lignes
directrices tarifaires ») ;
Vu la synthèse des travaux et recommandations sur les modalités tarifaires des raccordements finals
des réseaux en fibre optique jusqu’à l’abonné ;
Vu les éléments transmis à l’Autorité par la société publique locale Nouvelle-Aquitaine Très Haut-Débit
(ci-après « NATHD ») par un courrier en date du 14 février 2024, reçus parl’Autorité le 16 février 2024 ;
Vu les autres éléments du dossier ;
Après en avoir délibéré le 2 avril 2024,
Formule l’avis suivant :
1 Cadre juridique et contexte
L’article L. 1425-1 du CGCT définit les principes applicables à l’intervention des collectivités territoriales
et de leurs groupements dans le secteur des communications électroniques. Conformément au I de
cet article, ces interventions « garantissent l’utilisation partagée des infrastructures établies ou
Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse 2/8
acquises en application du présent I et respectent les principes d’égalité et de libre concurrence sur les
marchés des communications électroniques. Elles s’effectuent dans des conditions objectives,
transparentes, non discriminatoires et proportionnées. »
Le VI de l’article L. 1425-1 du CGCT, issu de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance,
l’activité et l’égalité des chances économiques, précise les principes applicables s’agissant plus
précisément des conditions tarifaires d’accès aux infrastructures et aux réseaux de communications
électroniques établis par les collectivités territoriales. Ces conditions doivent être « objectives,
transparentes, non discriminatoires et proportionnées et [garantir] le respect du principe de libre
concurrence sur les marchés des communications électroniques ainsi que le caractère ouvert de ces
infrastructures et de ces réseaux. » De plus, les conditions tarifaires appliquées doivent « [prendre] en
compte l’apport d’aides publiques de manière à reproduire les conditions économiques d’accès à des
infrastructures et à des réseaux de communications électroniques comparables établis dans d’autres
zones du territoire en l’absence de telles aides. »
Les dispositions de cet article confient par ailleurs à l’Arcep une mission d’accompagnement des
collectivités territoriales en vue de leur permettre de définir des conditions tarifaires d’accès à leurs
réseaux à très haut débit en fibre optique en adéquation avec les principes définis par la loi, en prenant
notamment en compte le cadre européen applicable aux aides d’Etat.
L’Arcep a ainsi été chargée d’adopter des lignes directrices tarifaires susvisées, qui ont été publiées le
7 décembre 2015.
Elle est également amenée à examiner les conditions tarifaires d’accès à ces réseaux, qui lui sont
transmises au moins deux mois avant leur entrée en vigueur. Lorsque l’Arcep « estime que les
conditions tarifaires soulèvent des difficultés au regard du présent VI, [elle] émet un avis, qui peut être
rendu public, invitant la collectivité territoriale ou le groupement concerné à les modifier. Elle le
communique sans délai au ministre chargé des communications électroniques. »
Par ailleurs, le déploiement et l’exploitation des réseaux à très haut débit en fibre optique sont soumis
aux dispositions de l’article L. 34-8-3 du CPCE et aux décisions règlementaires prises par l’Arcep pour
son application. A ce titre, les conditions d’accès à ces réseaux doivent respecter les exigences prévues
notamment par les décisions n° 2009-1106 et n° 2010-1312 susvisées. Ces décisions prévoient
notamment que « les conditions tarifaires de l’accès […] doivent être raisonnables et respecter les
principes de non-discrimination, d’objectivité, de pertinence et d’efficacité. Le taux de rémunération du
capital utilisé pour la détermination de ces conditions tarifaires tient compte du risque encouru et
confère une prime à l’opérateur d’immeuble. »
1
La décision n° 2009-1106 définit de la manière suivante les principes précités, dans le respect desquels
les conditions tarifaires doivent être établies :

  • « le principe de non-discrimination : un traitement discriminatoire d’opérateurs se trouvant dans des
    situations similaires aurait pour conséquence d’affaiblir la dynamique concurrentielle sur le marché de
    détail, en favorisant artificiellement une situation ou un choix stratégique ;
  • le principe d’objectivité : la tarification mise en œuvre par l’opérateur doit pouvoir être justifiée à
    partir d’éléments de coûts clairs et opposables ;

1 Décision n° 2009-1106 de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes en date du 22 décembre
2009 précisant, en application des articles L. 34-8 et L. 34-8-3 du code des postes et des communications électroniques, les
modalités de l’accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique et les cas dans lesquels le
point de mutualisation peut se situer dans les limites de la propriété privée, page 43
Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse 3/8

  • le principe de pertinence : les coûts doivent être supportés par les opérateurs qui les induisent ou ont
    usage des infrastructures ou prestations correspondantes ; ainsi, l’opérateur d’immeuble ne doit pas
    supporter de coûts induits par la pose de fibres supplémentaires pour d’autres opérateurs ; en outre,
    ce principe appelle une cohérence entre partage des coûts et partage des revenus ultérieurs éventuels
    liés à l’accueil d’opérateurs se raccordant ultérieurement à l’immeuble ;
  • le principe d’efficacité des investissements : les coûts pris en compte doivent correspondre à ceux
    encourus par un opérateur efficace ; il convient donc que l’opérateur d’immeuble ne fasse pas supporter
    de coûts indus ou excessifs aux opérateurs tiers […] ».
    Ces décisions mettent également en avant le besoin de prévisibilité des opérateurs commerciaux, à
    travers plusieurs dispositions, qu’il s’agisse des obligations de transparence (publication des offres) ou
    des obligations tarifaires.
    Dans les motifs de la décision n° 2009-1106 se rapportant à l’obligation de publication des offres
    d’accès mentionnée à l’article 4 de cette même décision, il est indiqué que l’existence et la publication
    d’une offre d’accès « doit notamment permettre d’apporter de la visibilité et de la stabilité aux
    opérateurs dans l’élaboration de leurs plans de développement ». Il est ajouté que « [l]es opérateurs
    tiers ont besoin, lors de l’élaboration de leurs plans d’affaires et de leurs stratégies techniques et
    commerciales, de disposer d’une bonne visibilité sur les conditions techniques et tarifaires proposées
    par l’opérateur d’immeuble. »
    2
    Dans les motifs de la décision n° 2009-1106 se rapportant aux conditions tarifaires de l’accès, l’Autorité
    indique « partage[r] pleinement l’analyse de la Commission concernant la nécessité d’un niveau de
    prévisibilité suffisant pour permettre à l’ensemble des opérateurs, et notamment à ceux souhaitant
    s’engager dans le co-investissement, de construire des plans d’affaires précis. Pour s’engager dans des
    projets d’investissement ou de co-investissement aussi importants, les opérateurs ont besoin d’une
    certaine visibilité sur les coûts qu’ils encourront et sur les recettes qu’ils percevront. »3
    Dans les motifs de la décision n° 2010-1312, l’Autorité précise qu’« [e]n dehors des zones très denses,
    il apparaît nécessaire que l’opérateur d’immeuble propose aux opérateurs tiers des modalités d’accès
    garantissant un accès pérenne dans des conditions non discriminatoires et permettant de monter dans
    l’échelle des investissements. »4
    Cette visibilité est d’autant plus nécessaire que la boucle locale optique mutualisée revêt, selon
    l’Autorité de la concurrence, le caractère de « monopole naturel »5 dans les zones moins denses.
    L’Arcep a ainsi pu rappeler que « la détention et l’exploitation du réseau mutualisé, qui n’est pas
    réplicable, sur un marché dont les prestations sont indispensables à la fourniture sur un marché de
    détail aval sont susceptibles de générer des comportements anticoncurrentiels et économiquement

2 Décision n° 2009-1106 de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes en date du 22 décembre
2009 précisant, en application des articles L. 34-8 et L. 34-8-3 du code des postes et des communications électroniques, les
modalités de l’accès aux lignes de communications électroniques à très haut débit en fibre optique et les cas dans lesquels le
point de mutualisation peut se situer dans les limites de la propriété privée, page 30.
3
Ibid., page 28.
4 Décision n° 2010-1312 en date du 14 décembre 2010 précisant les modalités de l’accès aux lignes de communications
électroniques à très haut débit en fibre optique sur l’ensemble du territoire à l’exception des zones très denses, page 30.
5 Avis n° 10-A-18 du 27 septembre 2010 relatif à un projet de décision de l’Autorité de régulation des communications
électroniques et des postes portant sur le déploiement de la fibre optique en dehors des zones très denses [projet de décision
n° 2010-1312], page 8 : « Dans les zones concernées, désignées « zones moins denses » par l’ARCEP, cette situation présente
plusieurs caractéristiques : / – la boucle locale en fibre optique revêt le caractère d’un monopole naturel, c’est-à-dire qu’un
opérateur qui installerait un réseau fibre aurait peu de chance de voir un réseau concurrent s’installer […] ».
Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse 4/8
sous-optimaux. D’une part, le détenteur de cette portion non réplicable peut se livrer à des abus
d’exploitation, notamment en pratiquant un prix d’accès à son infrastructure bien supérieur au prix
d’équilibre afin de se réserver une rente de monopole dont les ressources peuvent distordre la
concurrence sur d’autres marchés. Par ailleurs, un tel comportement aura pour effet d’augmenter
mécaniquement les prix supportés in fine par les consommateurs. »
6
.
De plus, conformément à l’article L. 32-1 du CPCE, il appartient à l’Arcep, dans le cadre de l’ensemble
de ses attributions, de veiller notamment aux objectifs suivants :

  • à l’exercice au bénéfice des utilisateurs d’une concurrence effective et loyale entre les
    exploitants de réseau et les fournisseurs de services de communications électroniques, en
    particulier lorsqu’ils bénéficient de subventions publiques conformément aux articles 106 et
    107 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ;
  • à la définition de conditions d’accès aux réseaux ouverts au public et d’interconnexion de ces
    réseaux qui garantissent la possibilité pour tous les utilisateurs de communiquer librement et
    l’égalité des conditions de la concurrence ;
  • à la promotion des investissements et de l’innovation dans les infrastructures améliorées et
    de nouvelle génération, en tenant compte, lorsqu’ils fixent des obligations en matière d’accès,
    du risque assumé par les entreprises qui investissent, et à autoriser des modalités de
    coopération entre les investisseurs et les personnes recherchant un accès, afin de diversifier
    le risque d’investissement dans le respect de la concurrence sur le marché et du principe de
    non-discrimination.
    Il résulte de l’ensemble de ces éléments qu’en application de l’article L. 1425-1 du CGCT, et en
    particulier de l’obligation de fournir l’accès dans des conditions notamment objectives,
    proportionnées et transparentes, les éventuelles évolutions tarifaires doivent reposer sur des
    éléments objectifs qui doivent pouvoir être justifiés, tout en tenant compte du besoin de visibilité des
    opérateurs commerciaux, et en particulier des cofinanceurs, sur les conditions d’accès aux réseaux
    FttH d’initiative publique, notamment sur les tarifs dont ils s’acquittent et auront à s’acquitter.
  • *
    *
    NATHD a notifié à l’Arcep par un courrier en date du 14 février 2024 ses nouvelles conditions tarifaires
    en application de l’article L. 1425-1 CGCT.
    Après analyse des conditions tarifaires transmises par NATHD, l’Autorité estime que certaines des
    conditions tarifaires d’accès à ce réseau sont de nature à soulever des interrogations au regard des
    principes définis par le législateur au VI de l’article L. 1425-1 du CGCT. Ces interrogations conduisent
    l’Arcep à rendre le présent avis.

6 Décision n° 2010-1312 en date du 14 décembre 2010 précisant les modalités de l’accès aux lignes de communications
électroniques à très haut débit en fibre optique sur l’ensemble du territoire à l’exception des zones très denses, pages 30 et
31.
Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse 5/8
2 Présentation du réseau de NATHD
Le réseau d’initiative publique (ci-après « RIP ») de NATHD couvre sept départements de la région
Nouvelle-Aquitaine pour une cible totale de 720 000 lignes de communications électroniques à très
haut débit en fibre optique jusqu’à l’abonné (ci-après « FttH »). Les premières commercialisations sur
ce RIP ont eu lieu à partir de 2019 et de nombreux opérateurs commerciaux, dont les 4 opérateurs
commerciaux d’envergure nationale, sont présents sur ce réseau, certains notamment étant présents
en cofinancement depuis 2 à 4 ans.
Le montage de ce réseau d’initiative publique est le suivant :

  • le réseau est construit par 5 syndicats mixtes ouverts (ci-après « SMO ») : DORSAL (en Corrèze,
    Creuse et Haute-Vienne), Lot et Garonne numérique, Charente Numérique, Périgord
    Numérique et le Sydec 40 (dans les Landes) ;
  • ces 5 SMO ont confié l’exploitation de ces réseaux, par l’intermédiaire de contrats d’affermage
    à la société publique locale (ci-après « SPL ») NATHD, dont ils sont les actionnaires ; au titre
    des contrats d’affermage, la SPL NATHD verse une redevance d’affermage annuelle à chaque
    SMO ;
  • pour assurer l’exploitation de ces réseaux, la SPL NATHD a conclu, après mise en concurrence,
    un contrat avec une filiale du groupe Axione (LFNA – La Fibre Nouvelle Aquitaine).
    On notera que le montage du RIP NATHD est peu courant parmi les autres RIP FttH, en particulier ceux
    mis en place dans le cadre du Plan France Très Haut Débit. La plupart des projets de RIP FttH du Plan
    France Très Haut Débit ont en effet recouru à des montages dans lesquels un opérateur privé, désigné
    après mise en concurrence, a en charge à la fois la construction et l’exploitation du réseau, ou à des
    montages où les réseaux sont, après construction, mis en affermage auprès d’un partenaire privé
    désigné après mise en concurrence. La situation du RIP NATHD présente donc des spécificités : les
    collectivités porteuses du projet de RIP supportent l’intégralité du coût du déploiement du réseau, par
    le biais des SMO ; elles en assurent également l’exploitation à travers la SPL.
    3 Présentation des évolutions tarifaires notifiées par NATHD
    La SPL NATHD a notifié à l’Arcep par un courrier en date du 14 février 2024 ses nouvelles conditions
    tarifaires en application de l’article L. 1425-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT).
    Cette notification présente les hausses suivantes :
    Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse 6/8
    Accès au nœud de raccordement
    optique (ci-après « NRO »)
    Accès au point de
    mutualisation (ci-après « PM »)
    Tarif actuel Nouveau
    tarif Tarif actuel Nouveau
    tarif
    Récurrent mensuel par Prise
    Activée
    5,34 €/ligne
    active/mois
    10,39 €/ligne
    active/mois
    5,06 €/ligne
    active/mois
    9,90 €/ligne
    active/mois
    dont composante hors Génie
    Civil
    3,73 €/ligne
    active/mois
    8,74 €/ligne
    active/mois
    3,53 €/ligne
    active/mois
    8,33 €/ligne
    active/mois
    dont composante Génie Civil
    1,61 €/ligne
    active/mois
    1,65 €/ligne
    active/mois
    1,53 €/ligne
    active/mois
    1,57 €/ligne
    active/mois
    Abonnement mensuel
    Location Ligne FTTH passive
    14,07 €/ligne
    active/mois
    19,12 €/ligne
    active/mois
    12,72 €/ligne
    active/mois
    17,63 €/ligne
    active/mois
    Prix relatifs au Raccordement Client Final
    Tarif actuel Nouveau
    tarif
    Prix unitaire pour la fourniture et la pose d’un
    Raccordement FTTH passif avec Câblage
    Client Final bi-connecteur par le Fournisseur
    250 € 358 €
    Abonnement Raccordement Lissé
    2,30 €/ligne
    active/mois
    3,29 €/ligne
    active/mois
    NATHD a fourni à l’Arcep, pour justifier ces hausses, un bilan prévisionnel dressant un constat de déficit
    de l’ensemble du projet (comprenant à la fois la SPL et les SMO et tous les segments du réseau) sur la
    période 2015-2032 et calculant la nouvelle valeur du tarif récurrent PM-PBO de manière à combler ce
    déficit.
    Les hausses tarifaires concernant le segment PM-point de branchement optique (ci-après « PBO »), en
    particulier du tarif récurrent de cofinancement, sont de nature à soulever des interrogations au regard
    des principes définis par le législateur au VI de l’article L. 1425-1 du CGCT qui conduisent l’Arcep à
    rendre le présent avis sur ces seules hausses.
    4 Analyse de l’Autorité sur les conditions tarifaires des offres d’accès
    proposées
    A titre liminaire, l’Autorité rappelle qu’en application des dispositions de l’article L. 1425-1 du CGCT
    l’accès est fourni dans des conditions, y compris tarifaires, objectives et proportionnées. Ces conditions
    doivent également, en application des dispositions précitées (partie 1), respecter les principes de
    pertinence et d’efficacité. L’Autorité considère qu’il est légitime que l’opérateur d’infrastructure
    puisse, le cas échéant, augmenter ses tarifs, notamment en cas d’évolution des conditions dans
    lesquelles le contrat d’accès a été conclu ou d’évolution imprévisible des circonstances.
    Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse 7/8
    Si l’Autorité reconnait la possibilité pour un opérateur d’infrastructure de procéder à des évolutions
    tarifaires, celles-ci doivent pouvoir être justifiées par des éléments objectifs dans le respect des
    principes de pertinence et d’efficacité et doivent également respecter le besoin de prévisibilité des
    opérateurs commerciaux, et en particulier des cofinanceurs, comme rappelé en partie 1. En particulier,
    les évolutions tarifaires ne doivent pas avoir pour effet de fragiliser les investissements consentis par
    les opérateurs commerciaux en remettant in fine en cause leur accès aux lignes FttH.
    Au cas présent, la hausse prévue, d’une ampleur importante, représente près d’un doublement du
    tarif récurrent mensuel de cofinancement, deux à quatre ans après la signature des contrats avec les
    cofinanceurs.
    De plus, l’Autorité s’interroge sur le caractère objectif et proportionné de ces hausses, ainsi que sur
    la pertinence et l’efficacité des coûts avancés par NATHD pour justifier les hausses notifiées.
    Tout d’abord, les éléments communiqués se bornent à dresser un constat de déficit de l’ensemble du
    projet (comprenant à la fois la SPL et les SMO) sur la période 2015-2032 et à calculer les hausses
    tarifaires proposées de manière à combler ce déficit. Les éléments fournis ne permettent en particulier
    pas de comprendre le lien entre les évolutions survenues depuis la signature des contrats entre la SPL
    NATHD et les opérateurs commerciaux (et l’établissement des tarifs associés) et l’augmentation des
    tarifs.
    Par ailleurs, certains des éléments transmis peuvent soulever des interrogations. Ainsi le choix
    d’apprécier l’équilibre économique du projet sur une durée de 17 ans, qui n’est d’ailleurs pas
    mentionnée dans les contrats liant les cofinanceurs à la SPL NATHD, semble discutable. A cet égard,
    on notera que la valeur faisant référence dans le secteur est de 25 ans 7 et a été utilisée pour
    l’établissement des lignes directrices tarifaires. Les collectivités, par le biais de leur(s) futur(s)
    délégataire(s), continueront d’ailleurs à exploiter et tirer des revenus de l’exploitation du réseau audelà de 2032, revenus qui ne sont pas pris en compte dans le bilan fourni par NATHD bien qu’ils
    puissent contribuer à couvrir les éventuels déficits constatés sur la période 2017-2032. On notera à cet
    égard que la fin des déploiements du réseau exploité par la SPL NATHD est prévue en mi-2026 et
    l’atteinte du taux de pénétration cible en 2030. C’est donc bien à partir du début des années 2030 que
    les recettes tirées de l’exploitation du réseau atteindront leur valeur annuelle pérenne et maximale.
    Or le calcul d’un équilibre sur la période 2017-2032 ne permet pas de tenir compte de cet effet.

A noter enfin, que la référence au tarif du dégroupage du réseau cuivre d’Orange mentionnée par la
SPL NATHD à plusieurs reprises8 pour démontrer que le nouveau tarif récurrent de cofinancement
envisagé, de l’ordre de 10€/ligne/mois, n’excède pas la capacité à payer des opérateurs commerciaux
et n’aura pas de répercussion sur les tarifs de détail, ne parait pas pertinente. En effet, le tarif du
dégroupage, de l’ordre de 10 €/ligne/mois, correspond à la location de la ligne complète. Il ne peut
donc pas être comparé au tarif récurrent de cofinancement du seul segment PM-PBO et correspond à
un accès en mode locatif, et non à une situation où l’opérateur commercial cofinance le réseau.
On notera par ailleurs que les nouveaux tarifs sur le segment PM-PBO notifiés par NATHD, qui a
bénéficié de subventions du plan France Très Haut Débit, sont substantiellement supérieurs aux tarifs

7 Cette durée de 25 ans est celle utilisée dans le modèle générique de tarification de l’accès aux réseaux à très haut débit en
fibre optique en dehors des zones très denses de l’Arcep utilisé pour l’établissement des lignes directrices tarifaires.
8 La SPL NATHD indique notamment sur son site internet https://nathd.fr/equilibre-rip/ que « les Opérateurs commerciaux
nationaux […] payent 5 euros environ en exploitation […] alors qu’ils payent actuellement plus de 10 euros à l’opérateur
d’infrastructure cuivre dans le cadre du dégroupage pour offrir de l’ADSL »
Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse 8/8
similaires actuellement en vigueur en zone d’initiative privée9
. Or le plan France Très Haut Débit visait
à permettre la reproduction en zone d’initiative publique des conditions tarifaires d’accès aux réseaux
FttH existantes en zone d’initiative privée, dans le but in fine d’avoir des tarifs de détail homogènes
sur l’ensemble du territoire national.
Au vu des éléments exposés ci-dessus, l’Autorité estime, contrairement à ce que soutient NATHD, qu’il
existe un risque que les opérateurs commerciaux répercutent sur les tarifs de détail pratiqués sur le
réseau de NATHD la différence de coût par rapport au reste du territoire national induite par les tarifs
notifiés. L’Autorité voit donc dans les nouveaux tarifs notifiés par NATHD un risque important
d’augmentation des tarifs de détail sur le territoire de NATHD et plus largement de remise en cause
de la logique d’homogénéité nationale des conditions d’accès qui sous-tend le plan France Très Haut
Débit.
5 Conclusion
Au regard de ce qui précède, l’Autorité estime que certaines des conditions tarifaires d’accès à ce
réseau sont de nature à soulever des difficultés au regard des principes introduits au VI de l’article L.
1425-1 du CGCT par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015.
Les éléments détaillés ci-dessus conduisent l’Autorité à inviter la SPL NATHD à s’assurer du caractère
transparent, objectif et proportionné des tarifs d’accès qu’elle pratique, et à revoir son projet
d’augmentation des tarifs.
Conformément aux dispositions de l’article L. 1425-1 du CGCT, le présent avis est publié sur le site de
l’Arcep et communiqué au ministre chargé des communications électroniques.

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